Echo de la journée "Politique du cartel, politique de la psychanalyse"

  • Journée Inter-cartel à Clermont-Ferrand
    Journée Inter-cartel à Clermont-Ferrand
  • Invitée à participer par zoom à cette matinée d’échange qui a eu lieu à Clermont-Ferrand, j’ai été saisie par l’effet de surprise de chacune des interventions. Voix singulières qui ont percuté en donnant à lire ce que fut mon long trajet, qui se poursuit encore, de lectures en cartels. « Être lacanien, une contingence ? », cette énonciation introductive donnait le fil de cette journée où le singulier de l’expérience de lecture en cartel se noue au discours analytique, à la politique de la psychanalyse. Des concepts comme transfert de travail, cartel organe de l’école, savoir troué, la fonction du plus-un dans le cartel, et d’autres signifiants propres à notre champ ont pu résonner de façon toute nouvelle avec simplicité sans simplification. Chaque intervenant œuvrant au bien dire de son expérience de cartellisant, pouvant serrer au plus près la place indispensable et impossible du ’plus un’.

    Ainsi les dits de chacun ont su faire résonner la raison du cartel pour la pratique du discours analytique. Le cartel n’est pas seulement une instance de travail. Il est courroie de transmission d’un savoir qui ne cesse de nous mettre au travail et faire lien social vivant dans la communauté analytique. Passer de la mortification du savoir du maître, celui dont on veut se saisir pour avoir l’emblème phallique qui nous ferait reconnaitre membre d’un groupe analytique à l’expérience toujours inédite d’un savoir qui vient à notre rencontre par la discipline du cartel, savoir vivant, vivifiant qui permet le nouage de son expérience d’analysant avec les textes fondateurs. La politique du cartel a pu être ainsi nommée politique de l’intranquillité joyeuse. Cette matinée de travail qui n’a cessé d’articuler le temps logique et chronologique a été particulièrement éclairante pour moi qui dès les années 1970 me suis adonnée à la lecture de Lacan en cartels. A cette époque, des tensions extrêmes et parfois féroces entre différentes institutions analytiques, poussaient à une lecture de maîtrise savante des concepts absolutisés de la psychanalyse. Le primat du symbolique, tel qu’il s’énonçait dans le Discours de Rome, orientait certains cartellisant et analystes vers une politique de la validation des nominations. Durant cette journée a raisonné un autre temps du discours analytique, un temps de réveil où le sujet lecteur n’est pas orienté par une nomination qui garantirait le savoir articulé au langage, mais se risque à approcher un impossible à dire qui le concerne dans ce qui l’appareille au langage, la lalangue, se risque à ce qui du non savoir de la jouissance conditionne le bien dire.

    Ainsi le cartel se comprend comme une expérience de lecture, pas sans risque ni sans effet, pour le sujet lecteur-analysant dans son transfert au texte et qui maintient l’ouverture sur la contingence et l’impossible à dire. Il suppose cette confiance dans le transfert de travail qui oriente la politique de l’École.

    Sophie Boutin