Echo de la matinée Question sur le genre

  • Echo de la matinée Question sur le genre
    Echo de la matinée Question sur le genre
  • Echo de la matinée du 11 juin 2022 

     

    C’est grâce à trois œuvres artistiques très différentes, que Sonia Vachon, Gilles Biot et Maï Linh Masset ont choisi de questionner le concept de genre.

    Chaque œuvre nous a enseigné sur l’impossible, l’impossible à choisir un sexe, l’impossible à faire couple, l’impossible à renoncer à son désir…

    Mais cet impossible est surtout lié à la langue, à la rencontre de la langue sur le corps qu’on veut effacer en tentant de se ranger sous l’abri d’un signifiant.

    La question du genre est une dimension qui tente de cerner par le signifiant, ce que ce dernier ne peut attraper. C’est peut-être pour cela qu’une multitude de nouveaux signifiants accolés au LGBT (homo, transgenre…), émerge pour essayer de dire ce qui échappe à se dire.

     

    Pour Farah, l’héroïne du roman « Arcadie » d’Emmanuelle Bayamack-Tam, impossible de choisir un sexe, impossible de renoncer à être une fille alors que son corps se masculinise.

    Sans appui parental, vivant dans une secte où chacun peut jouir sans entrave, Farah se retrouve bien seule. L’amour pour son gourou et l’amour qu’il lui porte lui permettront d’y croire un temps. Mais la rencontre avec un « étranger » qui fait irruption dans la secte, va faire vaciller les semblants ; Arcadie, le gourou, chute de son idéal (en refusant d’accueillir cet autre), il devient alors un homme ! Face à cette désillusion, Farah quitte la communauté, quitte-le « nous », pour s’orienter avec sa nouvelle boussole : créer une communauté fondée sur l’amour et aller à la rencontre des gens hors normes. Cela sera son invention, une « brigade volante » qui ira à la rencontre de l’autre, au « un par un » des gens différents, en sortant du « tout possible » qu’offrait la secte.

     

    Pour Paul, impossible de renoncer à la jouissance qu’il a découverte « en faisant la femme ».

    La BD « Mauvais genre » de Chloé Cruchaudet que nous a présentée Gilles B. nous plonge dans une histoire, tirée de faits réels, où la norme mâle est au premier plan. Aussi, comment Paul, cet homme traumatisé par les horreurs de la guerre, peut-il retrouver une place et soutenir son « être un homme », alors qu’il a déserté. Sa femme Louise joue un rôle important, car elle lui propose de se travestir pour qu’il puisse redevenir un homme libre. Cette suppléance lui fait découvrir une jouissance qui voile pour un temps la question « d’avoir des couilles ». Mais quand il se retrouve exposé à soutenir de nouveau son « être un homme » après l’armistice, il décompense. Il redevient Paul mais la jouissance le hante. Son pouvoir sexuel chez les hommes et le regard qu’il a suscité lui ont fait découvrir une jouissance Autre qui finit par le détruire. Sa solution « être la reine du Bois de Boulogne » ne pourra plus tenir et son couple non plus.

     

    Pour Jared, impossible d’effacer les traces de son désir, de sa subjectivité.

    Avec le film Boy erased (le garçon effacé) de Joël Edgerton inspiré d’une histoire vraie, Maï Linh M. pose la question de ce qui peut être effacé, ou pas ?

    Jared 19 ans, fils de Pasteur, fait une rencontre sexuelle traumatisante, qui lui révèle son orientation sexuelle, à lui-même ignorée. Aussi, quand son père l’apprend il lui demande de faire une thérapie de conversion, où il s’agit de modifier l’identité sexuelle ou l’identité de genre d’une personne.

    Jared s’y soumet dans un premier temps, croyant qu’il peut changer, mais, face aux violences et humiliations rencontrées quotidiennement, il se rebelle et parvient à s’extraire de cette emprise avec le soutien de sa mère.

    Il accepte alors de faire le choix du savoir plutôt que celui de la croyance. Renoncer à ce qu’il est, l’aurait conduit à une mort subjective.

    Le 2 juillet 2022

    Hélène Clément